Le Conseil général de
l’Alimentation, de l’Agriculture et des Espaces ruraux s’est penché sur
la gestion des chevaux en fin de vie. Il a dévoilé des propositions
hallucinantes dans son rapport rendu en septembre dernier : rendre la
souscription d’une « assurance fin de vie » obligatoire pour les
propriétaires de chevaux qui refusent l’abattoir, faciliter l’entrée des
équidés médicamentés dans la chaîne alimentaire et interdire
l’exclusion définitive de la filière viande !
C’est chose faite aux premières assises de la filière équine, à Caen en septembre dernier. Le président de l’Association vétérinaire équine française (AVEF) lance l’idée de « facilités pour envoyer les chevaux à l’abattoir »... Une proposition combattue un mois plus tard par l’OABA (Oeuvre d’Assistance aux Bêtes d’Abattoir), qui signale la non-adaptation des structures existantes au cheval – et donc la grande souffrance des animaux ainsi abattus.
Un
centre équestre qui désirerait épargner l’abattoir à sa cavalerie
n’aurait plus d’autre choix que de souscrire une « assurance fin de
vie » pour chaque cheval
De notre côté, à Cheval Savoir,
nous soutenons une réglementation plus sévère des tarifs d’équarrissage
afin que les propriétaires n’aient pas la (mauvaise) surprise de se
retrouver devant une facture variant du simple au double, voire au
quadruple. Et le respect de la liberté de choix de chacun, sachant – les
enquêtes le prouvent – que le passage par l’abattoir est un évènement à
la fois brutal et violent, pour le cheval mais aussi pour des
propriétaires qui n’auraient d’autres choix pour des raisons financières
(voir notre article).
Une vague de suggestions en faveur de l’abattoir
On
se demandait d’où pouvait bien venir cette vague de suggestions en
faveur de l’abattoir… Le rapport du Conseil général de l’Alimentation de
l’Agriculture et des Espaces ruraux (CGAAER) semble être un élément de
réponse majeur.Publié en septembre dernier mais rendu public seulement en novembre, il a été mis en lumière fin janvier à l’initiative d’un site vétérinaire (Vetitude). Il va beaucoup plus loin que le président de l’AVEF, qui pendant les assises s’était vraisemblablement « contenté » de lancer des suggestions.
Les premières lignes de ce rapport de 33 pages annoncent la couleur : « le tonnage d’animaux équarris est très supérieur au tonnage abattu », il faut donc diminuer le nombre de chevaux équarris pour augmenter celui des chevaux abattus... Et dans ce but, le CGAAER souhaite « inciter » les propriétaires à faire abattre leurs chevaux plutôt qu’à les garder en retraite. Il propose une série d’actions à mettre en place, dont l’une a particulièrement retenu notre attention : « Le système assuranciel […] devrait être rendu obligatoire pour les propriétaires qui par choix idéologique ne souhaitent pas que leur animal aille à l’abattoir et qui indiqueront ce choix dans le livret. »
Une assurance obligatoire dont le coût pèserait chaque année de vie du cheval, alors que nombre de propriétaires sont déjà étranglés financièrement, déjà prêts à se priver jusqu’à la dernière extrémité (y compris à relâcher leur animal dans la nature, ce qui n’est évidemment pas une bonne idée) pour lui épargner l’abattoir !
Un rapport partisan qui ignore les associations de protection du cheval
La
liste des personnes consultées pour rédiger le rapport ne laisse
apparaître le nom d’aucune personne représentative des propriétaires
d’équidés de loisir, d’aucun responsable de centre de sauvetage ou de
retraite, d’aucun défenseur des droits des animaux quel qu’il soit. Et
ce alors même que les propriétaires d’équidés de loisir sont les
premiers concernés par la question, et qu’ils représentent la majorité
des détenteurs de chevaux sur le sol français. Au moment où la question
de l’éthique animale mobilise un grand nombre de nos concitoyens, seules
les considérations économiques de quelques acteurs du monde équestre
sont prises en compte. INTERBEV équins (l’Interprofession du bétail et des viandes) est tellement gagnant que l’on en vient à se demander si ce rapport n’a pas été rédigé directement en faveur de ses intérêts… Dans un pays où la grande majorité des propriétaires se déclarent opposés à l’abattage et à la consommation de la viande de cheval, ce rapport est un immense affront aux amoureux des chevaux. Aucune piste n’est esquissée pour un retour à la gratuité de l’équarrissage, ou pour une quelconque aide en faveur des propriétaires concernés. Ironie du sort, la souscription à une « assurance fin de vie » obligatoire est présentée comme une façon d’étaler et de prévoir le paiement de l’équarrisseur sur plusieurs mois, et donc une mesure « en faveur des propriétaires » !
Aucune solution alternative pour les chevaux âgés
Pire, cette « solution » vient tuer dans l’œuf certaines initiatives originales pour valoriser les chevaux âgés, comme celle du centre équestre de Chauché
qui organise des séances de communication homme-cheval à pied. Un
centre équestre qui désirerait épargner l’abattoir à sa cavalerie
n’aurait plus d’autre choix que de souscrire une assurance pour chaque
cheval. Inutile d’ajouter qu’ils sont certainement très peu à en avoir
les moyens. Pourtant, les bienfaits de la présence d’un cheval même âgé
sont abondamment prouvés. Dernière expérience en date, l’hôpital
Sainte-Marie de Villepinte vient d’accueillir les chevaux à la retraite
du centre équestre voisin sur un terrain proche des bâtiments où sont
soignées les personnes âgées. Le bénéfice sur la santé et le bien-être
de ses patients comme des chevaux est évident.Que dire des associations de sauvegarde et de placement d’équidés âgés ou maltraités, complètement oubliées dans ce rapport ? Tenues à bout de bras par des bénévoles sur la base de l’urgence et du volontariat (avec plus ou moins de succès), il est très clair qu’aucune à l’heure actuelle ne peut se permettre de souscrire une « assurance fin de vie » pour chaque cheval hébergé…
Adopter cette proposition de loi telle quelle reviendrait à condamner toutes ces associations à fermer.
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